Le Solidarisme Contractuel Dans les Relations Contractuelles Inégalitaires : L’exemple du Contrat de Travail. Une Approche Comparative des Droits Camerounais et Français

JurisdictionSouth Africa
AuthorVirginie Magloire Tchamwock-Deuffi
Published date16 August 2019
Pages57-83
Date16 August 2019
Citation(2016) 3(2) Journal of Comparative Law in Africa 57
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LE SOLIDARISME CONTRACTUEL DANS
LES RELATIONS CONTRACTUELLES
INÉGALITAIRES: L’EXEMPLE DU CONTRAT DE
TRAVAIL. UNE APPROCHE COMPARATIVE DES
DROITS CAMEROUNAIS ET FRANÇAIS1
VIRGINIE MAGLOIRE TCHAMWOCK-DEUFFI
Docteur en droit privé
Assistante à la faculté des Sciences
Juridiques et Politiques de l’Université de Douala
Le droit des contrats a connu une grande évolution ces dernières années. L’objectif
de recherche de l’équilibre entre les parties au contrat a été au cœur des différentes
préoccupations et la doctrine du solidarisme contractuelle a favorisé cette tendance
à la moralisation des rapports entre les parties au contrat. Le droit du travail n’est
pas resté en marge de cette évolution. En effet, en droit camerounais et français, les
relations entre employeur et salarié ont évolué vers une prise en compte par chacune
des parties des intérêts de l’autre. À cet égard, en dépit du lien de subordination
qui gouverne le contrat de travail, les obligations classiques des parties ont été
renforcées. Les législateurs camerounais et français ont reconnu de manière implicite
l’existence du solidarisme contractuel en droit du travail à travers la consécration de
l’obligation de reclassement et l’élargissement du domaine des mesures alternatives
au licenciement pour motif économique. L’on se demande si l’influence de cette
doctrine en droit social est compatible avec les fondements premiers du contrat de
travail, notamment le lien de subordination. À ce questionnement, une réponse
affirmative s’impose. Le lien de subordination reste le principe en matière de contrat
de travail. Cependant, la vision morale de la relation impose aux parties de se
regarder comme des partenaires mus par le désir de faire tout leur possible afin de
satisfaire leurs intérêts respectifs. Cela implique que chacune des parties prenne en
compte les intérêts de son cocontractant, lui facilite la tâche. L’intérêt supérieur du
contrat l’impose. Sans cette solidarité entre les parties, elles ne sauraient opérer des
choix judicieux et le contrat de travail resterait un phénomène inachevé.
1 Quelques précisions utiles mér itent d’être apportées à l’entame de ce travail. Il est certain
que les terrains de recherche sont le droit camerounais et le droit français, positif et prospectif,
mais le recours au droit français à titre principal s’est avérée nécessaire pour plusieurs raisons. Tout
d’abord, les bases théoriques et conceptuelles de la doctrine du solidarisme contractuel sur laquelle
ces développements s’appuient sont essentiellement du droit français. Ensuite, la rareté des travaux
scientifiques sur la matière (surtout appliqué au droit du travail) en droit positif camerounaisnous
conduit à recourir aux travaux français et européen sur la question. Enfin, la même observation est
valable en ce qui concerne la jurisprudence utilisée. Voir cependant en droit camerounais, THASSE
(G-G.), Le solidarisme en droit du travail, thèse de doctorat, Yaoundé II, 2012.
(2016) 3(2) Journal of Comparative Law in Africa 57
© Juta and Company (Pty) Ltd
58 JOURNAL OF COMPARATIVE LAW IN AFRICA VOL. 3, NO. 2, 2016
Mots clés: Droit social - Solidarisme contractuel - Obligation de
reclassement - Équilibre contractuel- Mesures alternatives
- Partage du travail.
Contract law has experienced great changes in recent years. The goal of striking a
balance between the parties to the contract was at the heart of different concerns.
And the doctrine of contractual solidarity encouraged this tendency to moralise the
relations between the contracting parties. Labour law has not not remained in the
margins of this development. Indeed, in Cameroonian and French law, relations
between employer and employee have evolved into the consideration by each party
of the interests of the other. In this regard, despite the subordination that governs
the employment contract, the conventional obligations of the parties have been
strengthened. Cameroonian and French legislators have implicitly recognised the
existence of contractual solidarity in labour law by consecrating the obligation of
reclassification and by expanding the realm of alter natives to dismissal for economic
reasons. One wonders whether the influence of this doctrine in employment law
is compatible with the first foundations of the employment contract, in particular
subordination. To this question, an affir mative answer is required. Subordination
remains the foundation of the employment contract. However, the moral vision of
the relationship requires parties to see each other as partners motivated by the desire
to do everything possible to satisfy their respective interests. This implies that each
party takes into account the interests of the other party, and makes his task easier.
The superior interest of the contract requires this. Without this solidarity between
the parties, they cannot make wise choices and employment contracts remain an
unfinished phenomenon.
Keywords: Labour law, contractual solidar ity, obligation of
reclassification, contractual balance, alternative measures,
work sharing.
L’inégalité des parties dans une relation contractuelle est la situation
dans laquelle une des parties est soumise économiquement et parfois
juridiquement à l’autre partie. La première propose en règle générale
le contrat ainsi que l’ensemble de ses clauses à la seconde, laquelle est
tenue soit de les accepter en bloc ou de les refuser. Ledit contrat n’est
véritablement pas négocié2. C’est généralement le cas des relations
contractuelles qui existent en droit du travail. Défini comme l’ensemble
« des règles d’origine législative, réglementaire, jurisprudentielles et
conventionnelles régissant les relations individuelles et collectives de travail
2 Ces contrats sont appelés contrats d’adhésion, c’est-à-dire ceux dans lesquels le consentement
de l’une des parties «consiste à accepter une proposition qui est à prendre ou à laisser sans discussion,
adhérant ainsi aux conditions établies unilatéralement à l’avance par l’autre partie…», CORNU(G)
(dir.), Vocabulaire Juridique de l’Association Henri CAPITANT, 10ème édition mise à jour, coll.
«Quadrige», PUF janvier 2014, p. 30.
© Juta and Company (Pty) Ltd

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